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# Le néolibéralisme menace-t-il notre démocratie ?
Dans un monde en pleine mutation, où les crises se succèdent et où les inégalités se creusent, de nombreuses voix s'élèvent pour dénoncer les dérives du système économique et politique dominant : le néolibéralisme. Mais qu'est-ce que le néolibéralisme exactement ? Et en quoi représente-t-il un danger pour nos démocraties ? Pour comprendre ces enjeux cruciaux, plongeons dans l'histoire de ces deux concepts et analysons leurs interactions complexes.
## Aux origines du néolibéralisme : une réponse à la crise du libéralisme classique
Le néolibéralisme est né dans l'entre-deux-guerres, en réaction à la crise du capitalisme et à la montée des régimes totalitaires. Ses fondateurs, réunis en 1938 lors du colloque Walter Lippmann à Paris, cherchaient à repenser et adapter le libéralisme au contexte du 20e siècle.
Contrairement au libéralisme classique qui prônait un "laisser-faire" total, le néolibéralisme considère que l'État a un rôle important à jouer pour créer et maintenir les conditions de la concurrence. L'idée centrale est que le marché et la concurrence ne sont pas des données naturelles, mais des constructions qui nécessitent l'intervention de l'État pour fonctionner.
Ainsi, le néolibéralisme se distingue par une vision plus interventionniste du rôle de l'État, tout en restant attaché aux principes de liberté économique et de primauté du marché. Il s'agit d'une adaptation du libéralisme aux enjeux contemporains, avec une approche plus active de l'État pour promouvoir et encadrer la concurrence.
## Une vision biaisée de l'être humain et de la société
L'un des aspects les plus problématiques du néolibéralisme est sa conception de l'être humain et de la société. S'appuyant sur une interprétation erronée des théories de Darwin sur l'évolution, les penseurs néolibéraux comme Walter Lippmann considèrent que l'espèce humaine est inadaptée à la mondialisation et doit être "rééduquée".
Selon cette vision, le peuple serait incapable de comprendre les enjeux complexes du monde moderne et aurait besoin d'être guidé par une élite éclairée. Cette conception profondément anti-démocratique justifie la mise en place de politiques visant à "adapter" les individus aux exigences du marché mondialisé, au détriment de leurs aspirations et de leurs modes de vie traditionnels.
## Les dérives autoritaires du néolibéralisme
Si le néolibéralisme se présentait à l'origine comme compatible avec la démocratie, son application concrète a souvent conduit à des dérives autoritaires. En effet, la volonté de "fabriquer le consentement" des populations, selon l'expression de Lippmann, s'est traduite par le développement de techniques de manipulation de l'opinion publique et par une restriction progressive de l'espace démocratique.
La philosophe Barbara Stiegler souligne ainsi que "le néolibéralisme promeut un État fort pour façonner les individus et les marchés" et "s'oppose à la démocratie réelle en considérant le peuple comme inapte à se gouverner". Cette tendance s'est accentuée ces dernières années, avec le recours croissant à la violence (symbolique et physique) pour imposer des réformes impopulaires.
## La crise de la démocratie représentative
Face à ces dérives, nos systèmes politiques actuels, qualifiés de "démocraties", apparaissent de plus en plus comme des oligarchies représentatives où le peuple n'est pas réellement souverain. Comme le souligne Barbara Stiegler, "on est dans un mode de gouvernement très autoritaire très stratifié dans nos pays avec ceux qui sont censés savoir et puis les autres qui sont censés être guidés dans la bonne direction".
Cette situation contraste fortement avec l'idéal démocratique athénien, où le peuple (demos) était le véritable souverain et gouvernait directement. Si nos systèmes actuels ont élargi le corps des citoyens, ils ont aussi considérablement réduit leur pouvoir réel de décision.
## Vers un renouveau démocratique ?
Face à ce constat alarmant, de nombreux mouvements sociaux émergent pour réclamer un renouveau démocratique. Des Gilets jaunes en France aux mouvements pour la justice climatique dans le monde entier, on assiste à une résurgence des idéaux révolutionnaires et à une volonté de reprise en main du pouvoir par les citoyens.
Ces mouvements, bien que divers et parfois contradictoires, partagent une aspiration commune à plus de démocratie directe et de participation citoyenne. Ils rappellent que la démocratie n'est pas un acquis, mais un idéal à réinventer constamment face aux défis de notre époque.
## L'importance de l'éducation populaire
Pour contrer l'influence du néolibéralisme et revitaliser nos démocraties, l'éducation populaire apparaît comme un outil essentiel. Il s'agit de développer l'esprit critique des citoyens, de favoriser le débat démocratique et de dépasser les clivages simplistes sur les sujets de société.
L'éducation populaire, bien pratiquée, est un système de coéducation où tous les acteurs sont transformés les uns par les autres. Elle permet de renouer avec l'idéal démocratique athénien, où chaque citoyen était considéré comme capable de participer activement aux décisions politiques.
## Conclusion : réinventer la démocratie face aux défis du 21e siècle
Le néolibéralisme, en imposant sa vision réductrice de l'être humain et de la société, représente une menace réelle pour nos démocraties. Cependant, la crise actuelle peut aussi être vue comme une opportunité de réinventer nos systèmes politiques pour les rendre plus inclusifs, participatifs et à même de répondre aux défis du 21e siècle.
Pour cela, il est crucial de renouer avec l'idéal démocratique originel, tout en l'adaptant aux réalités de notre monde globalisé. Cela passe par un renforcement de l'éducation populaire, un développement de nouvelles formes de participation citoyenne et une remise en question de nos modèles économiques et sociaux.
Face à la tentation autoritaire du néolibéralisme, affirmons que la démocratie n'est pas un luxe, mais une nécessité vitale pour construire un avenir durable et juste pour tous. À nous, citoyens, de nous réapproprier le pouvoir et de faire vivre cet idéal au quotidien.
Sources ::
[1] https://www.scielo.br/j/rep/a/Fch3TXgZzY5MzqNBFWK8yqq/
[2] https://www.britannica.com/money/neoliberalism
[3] https://education.nationalgeographic.org/resource/democracy-ancient-greece/
[4] https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/10242589221078125
[5] https://www.aei.org/research-products/speech/periclean-athens-and-modern-democracy/
[6] https://www.wilpf.org/covid-19-what-has-covid-19-taught-us-about-neoliberalism/
N.D.L.R
Je suis tout à d'accord avec le fond de l'article proposé par Sonnet 3 5.
En revanche, je suis beaucoup moins optimiste que lui dans sa conclusion.
Il me semble, en effet, que le système néolibéral actuellement en place, dont la puissance augmente au quotidien grâce à ses alliés naturels : les médias de grand chemin, financés par l'argent des milliardaires, a déjà tout prévu concernant les révoltes qu'il pourrait susciter.
L'éducation prodiguée à nos enfants, les discours que l'on entend partout dans les médias, les publicités qui sont partout et tout le temps, tout cela a pour effet d'anesthésier profondément et d'ôter tout pouvoir de réflexion à tous ceux qui ne sont pas aux manettes du pouvoir.
Dans ces conditions, j'ai bien peur que le renouveau de la démocratie ne pourra pas venir de citoyens qui n’en sont plus endormis qu'ils sont par l’incessante propagande néolibérale. Au contraire, avec le dérèglement climatique qui menace directement notre planète, je suis persuadé que des mesures délibérément anti-démocratiques seront mises en place, qu’on le veuille ou non.
Dans ce but, ceux qui nous dirigent, attendent le plus longtemps possible pour mettre en place les mesures nécessaires pour favoriser la transition énergétique. En effet, est-il acceptable que tout au long de la récente campagne électorale, le sort tragique de notre planète et tout ce qu'il faudrait faire le plus rapidement possible pour le retarder n'aient même pas été envisagés ?
Ce mortel retard à l'allumage pour la transition énergétique, manifestement voulu et soutenu par tous ceux qui nous gouvernent, leur permet tout d'abord d'utiliser leurs ressources à d'autres sujets plus importants à leurs yeux ainsi que de pouvoir imposer des mesures résolument drastiques le moment venu au prétexte qu’il sera trop tard pour engager des transitions en douceur. Et, qu'en conséquence, il sera alors nécessaire d'utiliser la force pour contraindre les gouvernés à accepter les mesures qui s'imposeront alors pour retarder, si c'est encore possible, l'inévitable.
Évidemment, depuis longtemps, les ultrariches et leurs obligés : les gouvernants encore en place, seront, eux, douillettement calfeutrés dans leurs blockhaus somptueux afin de profiter du suprême avantage… de mourir les derniers.