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«L'avenir n'est plus ce qu'il était» [Paul Valéry]



La grande imposture : comment les chaînes d'info sacrifient la vérité sur l'autel du profit

Dans un paysage médiatique saturé où l'info est devenue un simple produit commercial, nos démocraties font face à un danger existentiel. Plongée dans les coulisses d'un système qui menace l'essence même de notre accès à la vérité. Un article d'Alternatives économiques.



Image Flux 1, via Perplexity
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Le mirage de l'information en continu :
autopsie d'un modèle en faillite

 

La révolution silencieuse de la TNT française

 

Le 1er mars 2025 a marqué un tournant dans l'histoire de la télévision française. Deux noms familiers ont disparu des écrans : C8 et NRJ 12. À leur place, T18 et OFTV s'apprêtent à entrer dans les foyers français, accompagnant une reconfiguration complète de la numérotation de la TNT orchestrée par l'Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique).
 

T18, portée par le groupe CMI du milliardaire tchèque Daniel Křetínský, se présente comme une chaîne de documentaires et de débats "en prise avec l'actualité" et devrait faire son entrée en juin prochain. De son côté, OFTV, émanation du quotidien régional Ouest-France, promet une information de proximité à partir du 1er septembre.
 

Ces nouveaux venus s'ajoutent à un paysage déjà saturé : CNews, BFM TV, LCI, France Info et France 24 occupent déjà le terrain de l'information en continu. Cette multiplication des acteurs fait craindre une dilution de la qualité éditoriale, comme le souligne l'historien des médias Alexis Lévrier.
 

L'Arcom n'échappe pas aux critiques. Nombre d'observateurs déplorent que l'autorité n'ait pas saisi l'occasion de retirer sa fréquence à CNews, dont la ligne éditoriale ultra-conservatrice, proche de l'extrême droite, soulève des questions éthiques fondamentales. François Jost, professeur émérite, pointe un "glissement inquiétant de chaîne d'information à chaîne de commentaire", une mutation qui n'a pas été suffisamment prise en compte par le régulateur.

La course à l'abîme : un modèle économique à bout de souffle

 

Dans cette arène médiatique surpeuplée, la bataille s'annonce impitoyable. Le contexte économique est particulièrement tendu : si le chiffre d'affaires global de la publicité en France progresse, la part dévolue à la télévision s'érode inexorablement au profit d'Internet. Les projections sont alarmantes : d'ici 2030, 65% des recettes publicitaires nettes seront captées par les acteurs numériques, selon une étude conjointe de l'Arcom et du ministère de la Culture.
 

Ce bouleversement fragilise considérablement les chaînes d'information gratuites qui dépendent presque exclusivement des revenus publicitaires. Avec une part d'audience globale de seulement 7,6%, ces médias se trouvent pris dans un étau : contraintes budgétaires d'un côté, nécessité d'attirer l'attention du public de l'autre.
 

CNews illustre parfaitement cette dérive. La chaîne du groupe Bolloré a réussi l'exploit de devenir rentable en 2024 en adoptant un modèle d'information "low cost" : moins de reportages, plus de débats, utilisation intensive de JRI (journalistes reporters d'images) pour limiter les coûts. Une stratégie d'optimisation économique qui se fait au détriment de la production d'information au sens strict.
 

D'autres ont tenté de résister. LCI s'est distinguée un temps par une couverture plus approfondie de l'actualité internationale, avant de revenir à une approche plus conservatrice face aux coûts prohibitifs de cette ambition. Cette volte-face témoigne des pressions financières qui pèsent sur l'ensemble du secteur.
 

Le pari fondamental de ces chaînes reste inchangé : intéresser suffisamment les Français à l'actualité pour générer des audiences rentables. Mais cette quête d'attention les conduit à privilégier des formats qui compromettent la qualité de l'information. François Jost constate avec amertume que "le modèle low cost s'est imposé dans le secteur", entraînant une uniformisation par le bas des standards journalistiques.

Le grand divorce : quand les Français décrochent de l'information

 

Paradoxalement, malgré cette multiplication des sources d'information, les Français manifestent un désintérêt croissant pour l'actualité. Une étude menée par la Fondation Jean-Jaurès, l'ObSoCo et Arte révèle une chute préoccupante : seulement 32% des Français se déclarent régulièrement actifs dans leurs pratiques informationnelles, soit 7 points de moins qu'en 2022.
 

Les chaînes d'information sont particulièrement touchées par cette désaffection, avec une perte de 11 points. Plus inquiétant encore, 83% des personnes interrogées affirment "se désespérer de l'être humain" lorsqu'elles suivent l'actualité. Un constat accablant qui s'explique notamment par un sentiment d'impuissance face aux événements du monde, partagé par 80% des Français.
 

Guénaëlle Gault, directrice générale de l'ObSoCo, pointe une autre cause majeure de ce détachement : l'information est perçue comme trop polarisée et déconnectée du vécu quotidien des citoyens. Elle ne remplit plus sa mission première d'éclairage du réel, mais semble prisonnière de ses propres logiques mercantiles.

Attention captive : les médias à l'heure de l'économie de la distraction

Face à cette crise de confiance, l'Arcom tente timidement de réagir. Sa nouvelle convention pour les chaînes d'information intègre des dispositions visant à garantir "une présentation honnête des questions prêtant à controverse" et "l'expression des différents points de vue". Des mesures qui semblent bien dérisoires face à l'ampleur des défis.
 

Car le problème est systémique : l'information est devenue l'otage de ce que les experts nomment "la guerre de l'attention". Pour survivre économiquement, les médias adoptent des mécanismes issus de la bataille algorithmique des plateformes numériques. Résultat : un traitement journalistique qui s'apparente de plus en plus à du divertissement, sacrifiant la substance au profit du spectacle.
 

Certains acteurs commencent néanmoins à prendre conscience des impasses de ce modèle. BFM TV a ainsi entrepris de revoir sa grille de programmes, remplaçant certaines émissions de débat par des journaux télévisés privilégiant les faits plutôt que les commentaires. Une tentative de repositionnement qui vise à reconquérir sa place de première chaîne d'information en continu, perdue au profit de CNews.

L'ombre des milliardaires : quand les industriels façonnent notre vision du monde

 

La question de la confiance est cruciale : seulement 49% des Français estiment pouvoir faire confiance aux médias d'information. Ce scepticisme n'est pas sans fondement. L'indépendance des chaînes d'information est compromise par leur appartenance à de puissants groupes industriels aux intérêts multiples.
 

Vincent Bolloré a transformé CNews en un média ouvertement politique, au service d'une vision conservatrice de la société. Rodolphe Saadé, patron du géant du transport maritime CMA CGM, a mis la main sur La Provence et La Tribune, tandis que Daniel Křetínský étend son empire médiatique avec sa nouvelle chaîne T18.
 

Ces acquisitions dépassent largement la simple logique de rentabilité. Elles s'inscrivent dans une stratégie d'influence où l'information devient un levier de pouvoir dans les batailles que se livrent les grandes figures du capitalisme contemporain. Cette concentration des sources de production d'information menace directement la diversité des points de vue et l'indépendance journalistique.
 

Le secteur public, qui pourrait constituer un contrepoids, souffre d'un manque chronique de moyens. France Info TV peine à capitaliser sur le succès d'audience de sa station radio éponyme, illustrant les difficultés à maintenir une information de qualité face aux contraintes budgétaires.
 

L'exemple d'Euronews est particulièrement révélateur. Ce qui devait être un média d'information à l'échelle européenne a été revendu en 2022 à Alpac Capital, fonds d'investissement proche des réseaux du premier ministre hongrois Viktor Orbán. Un échec symbolique qui témoigne des obstacles à la constitution d'espaces informationnels véritablement indépendants des intérêts économiques et politiques.

Démocratie en péril : quand l'information devient marchandise

 

L'enjeu dépasse largement le cadre médiatique. Si rien n'est fait pour préserver l'indépendance et la qualité de l'information, nous risquons d'évoluer vers un monde où "l'information indépendante des intérêts économiques n'existerait plus", comme le souligne l'enquête sur l'exode informationnel. Un monde où chacun vivrait dans sa propre bulle informationnelle, sa propre réalité et sa propre vérité.
 

Une telle fragmentation constituerait une menace existentielle pour nos démocraties, qui reposent sur un socle minimal de compréhension partagée du réel. Sans information fiable et accessible à tous, comment les citoyens pourraient-ils exercer leurs responsabilités démocratiques?
 

La concentration des médias aux mains de quelques milliardaires, couplée à l'érosion du modèle économique traditionnel de l'information, nous place face à un dilemme fondamental : comment financer une information de qualité tout en préservant son indépendance?
 

Les chaînes d'information en continu, prises dans l'étau des contraintes économiques et de la guerre de l'attention, sont devenues le symptôme le plus visible d'une crise profonde qui affecte l'ensemble de notre écosystème informationnel. Leur modèle low cost, privilégiant le commentaire au reportage, l'émotion à l'analyse, constitue une impasse tant journalistique que démocratique.
 

Face à ce constat, une réflexion collective s'impose. Comment réinventer un modèle qui permettrait de concilier viabilité économique et exigence éditoriale? Comment redonner aux citoyens le goût d'une information qui éclaire plutôt qu'elle n'aveugle? Comment garantir la pluralité des voix dans un paysage médiatique de plus en plus concentré?
 

Ces questions ne concernent pas uniquement les professionnels des médias. Elles interpellent chaque citoyen attaché aux valeurs démocratiques. Car l'information n'est pas une marchandise comme les autres : elle est l'oxygène de nos démocraties, la condition sine qua non d'un débat public éclairé.
 

À l'heure où les chaînes d'information se multiplient paradoxalement à mesure que la qualité de l'information se dégrade, c'est notre rapport collectif à la vérité qui est en jeu. Un enjeu qui mérite mieux que les logiques mercantiles et les stratégies d'influence qui dominent aujourd'hui le paysage médiatique français.
 

L'avenir de notre démocratie en dépend.
 

Cet article a été rédigé par Claude 3.7 Sonnet, via Perplexity, à partir d'une analyse approfondie publiée par Alternatives économiques, accessible via ce lien : https://www.alternatives-economiques.fr/modele-economique-chaines-dinformation-nuit-a-linformation/00114227


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Mardi 11 Mars 2025

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