La médecine est sexiste
A traitement identique, les femmes sont deux fois plus touchées par les effets secondaires des médicaments que les hommes.
« Médicaments : ils soignent mieux les hommes que les femmes. » C'est ce que révèle « Science et Vie », dans son magazine d'août, à paraître lundi et que nous avons pu consulter en exclusivité. Un gros pavé dans la mare : n'en déplaise aux féministes, homme et femme ne devraient pas être traités de la même façon, leur corps ne s'exprimant ni ne réagissant pareil. Les biologistes le savent, mais l'ensemble de la communauté scientifique et les médecins, le nez dans leur pratique quotidienne, n'en tiennent pas assez compte.
A médicament identique, effet différent. Différence de métabolisme oblige, Monsieur et Madame réagissent différemment, démontrent de très sérieuses études scientifiques, encore trop rares. Les vaccins ont ainsi plus d'effets sur les femmes, au système immunitaire plus réactif. Selon des chercheurs américains, une demi-dose suffit à leur faire produire autant d'anticorps qu'un homme. Avec une dose normale, elles sont du coup plus la proie des effets secondaires. L'enquête menée en Allemagne sur 25 000 patientes a d'ailleurs démontré que, tous traitements confondus, les femmes sont deux fois plus sujettes aux effets indésirables.
Côté somnifères, le Zolpidem (Stilnox) leur fait aussi effet plus longtemps. Huit heures après la prise, elles sont trois fois plus nombreuses à somnoler et cela n'a rien de « psy ». Le médicament est éliminé plus lentement de leur sang, parce que les enzymes qui y travaillent dans le foie s'organisent différemment que chez les hommes. Quant à l'aspirine, prescrite à faible dose pour prévenir le risque d'infarctus, elle agit effectivement sur le coeur... des hommes, diminuant le risque de 32 %. Chez les femmes, elle se révèle plus efficace pour réduire le risque d'AVC.
Le coeur des femmes maltraité. Toute considération sentimentale mise à part, le coeur d'une dame n'est pas un coeur d'homme, ni dans son anatomie (de plus petites artères), ni dans son fonctionnement, ni dans sa prise en charge, moins performante. Vice-présidente de la Fédération de cardiologie, Claire Mounier Véhier en a fait un combat, depuis le CHU de Lille. Alors que l'on considère toujours le risque cardiaque comme masculin, s'il est encore proportionnellement plus mortel pour l'homme, « il tue dix fois plus de femmes en Europe que le cancer du sein ! Aidée par une hausse des facteurs (tabac, obésité, stress), la mortalité grimpe d'autant qu'on ne le prend pas au sérieux », prévient la cardiologue.
Toxicité et stress ne jouent pas de la même façon sur le coeur des femmes. Et si les oestrogènes semblent les protéger un temps, leur risque rejoint celui des hommes après la ménopause. Les symptômes sont, eux, différents. Fatigue, nausées, maux de ventre et poitrine oppressée remplaçant la fameuse « douleur au bras gauche », les médecins mieux formés à la cardio masculine les renvoient parfois des urgences les pensant victimes... d'une crise d'angoisse, et sans prescrire les bons examens. Quant à la recherche, 30 % à peine est consacrée aux maladies cardiaques au féminin.
L'injustice dès la paillasse. Sauf cibles exclusivement féminines (ovaires, ménopause, grossesse) et gentiment surnommée « médecine bikini », dès le labo, au stade de la recherche animale, les tests sont essentiellement menés sur des rats mâles, « pour éviter que les hormones ne perturbent les résultats », confirme la généticienne Claudine Junien. Les filles se retrouvent aussi sous-représentées dans les études cliniques. Tant pis si cela biaise les résultats ! Pour y mettre fin, l'institut national de la santé américain (NIH), qui finance largement la recherche biomédicale, a décidé avant l'été d'y remédier. Désormais, plus question de subventions si les études n'analysent par leurs résultats en fonction du sexe.
Claudine Proust
A traitement identique, les femmes sont deux fois plus touchées par les effets secondaires des médicaments que les hommes.
« Médicaments : ils soignent mieux les hommes que les femmes. » C'est ce que révèle « Science et Vie », dans son magazine d'août, à paraître lundi et que nous avons pu consulter en exclusivité. Un gros pavé dans la mare : n'en déplaise aux féministes, homme et femme ne devraient pas être traités de la même façon, leur corps ne s'exprimant ni ne réagissant pareil. Les biologistes le savent, mais l'ensemble de la communauté scientifique et les médecins, le nez dans leur pratique quotidienne, n'en tiennent pas assez compte.
A médicament identique, effet différent. Différence de métabolisme oblige, Monsieur et Madame réagissent différemment, démontrent de très sérieuses études scientifiques, encore trop rares. Les vaccins ont ainsi plus d'effets sur les femmes, au système immunitaire plus réactif. Selon des chercheurs américains, une demi-dose suffit à leur faire produire autant d'anticorps qu'un homme. Avec une dose normale, elles sont du coup plus la proie des effets secondaires. L'enquête menée en Allemagne sur 25 000 patientes a d'ailleurs démontré que, tous traitements confondus, les femmes sont deux fois plus sujettes aux effets indésirables.
Côté somnifères, le Zolpidem (Stilnox) leur fait aussi effet plus longtemps. Huit heures après la prise, elles sont trois fois plus nombreuses à somnoler et cela n'a rien de « psy ». Le médicament est éliminé plus lentement de leur sang, parce que les enzymes qui y travaillent dans le foie s'organisent différemment que chez les hommes. Quant à l'aspirine, prescrite à faible dose pour prévenir le risque d'infarctus, elle agit effectivement sur le coeur... des hommes, diminuant le risque de 32 %. Chez les femmes, elle se révèle plus efficace pour réduire le risque d'AVC.
Le coeur des femmes maltraité. Toute considération sentimentale mise à part, le coeur d'une dame n'est pas un coeur d'homme, ni dans son anatomie (de plus petites artères), ni dans son fonctionnement, ni dans sa prise en charge, moins performante. Vice-présidente de la Fédération de cardiologie, Claire Mounier Véhier en a fait un combat, depuis le CHU de Lille. Alors que l'on considère toujours le risque cardiaque comme masculin, s'il est encore proportionnellement plus mortel pour l'homme, « il tue dix fois plus de femmes en Europe que le cancer du sein ! Aidée par une hausse des facteurs (tabac, obésité, stress), la mortalité grimpe d'autant qu'on ne le prend pas au sérieux », prévient la cardiologue.
Toxicité et stress ne jouent pas de la même façon sur le coeur des femmes. Et si les oestrogènes semblent les protéger un temps, leur risque rejoint celui des hommes après la ménopause. Les symptômes sont, eux, différents. Fatigue, nausées, maux de ventre et poitrine oppressée remplaçant la fameuse « douleur au bras gauche », les médecins mieux formés à la cardio masculine les renvoient parfois des urgences les pensant victimes... d'une crise d'angoisse, et sans prescrire les bons examens. Quant à la recherche, 30 % à peine est consacrée aux maladies cardiaques au féminin.
L'injustice dès la paillasse. Sauf cibles exclusivement féminines (ovaires, ménopause, grossesse) et gentiment surnommée « médecine bikini », dès le labo, au stade de la recherche animale, les tests sont essentiellement menés sur des rats mâles, « pour éviter que les hormones ne perturbent les résultats », confirme la généticienne Claudine Junien. Les filles se retrouvent aussi sous-représentées dans les études cliniques. Tant pis si cela biaise les résultats ! Pour y mettre fin, l'institut national de la santé américain (NIH), qui finance largement la recherche biomédicale, a décidé avant l'été d'y remédier. Désormais, plus question de subventions si les études n'analysent par leurs résultats en fonction du sexe.
Claudine Proust