Nouvelles Clés : Votre enquête concerne évidemment, en premier lieu, les dangers de l’électromagnétisme artificiel pour la santé. Et certes, en se promenant sous une ligne à haute tension par temps de pluie ou, pire encore, de neige, il est facile d’attribuer à tous ces grésillements un vilain air de menace. “Frayeurs obscurantistes”, semble répondre le discours scientifique officiel français. Et c’est la même fin de non recevoir pour les effets du téléphone portable. Bref, sauf en cas de contact direct avec un circuit ou d’échauffement des tissus, la plupart de l’électromagnétisme artificiel présent dans notre environnement serait sans aucune action sur le vivant. Pourtant l’Assemblée Nationale a adopté en juin 2000 une loi interdisant la construction d’habitations et d’établissements publics sous les lignes à haute tension. Toute cette ambiguïté se retrouve d’ailleurs dans l’attitude face aux thérapies électromagnétiques. Alors, pourquoi en sait-on si peu ?
Jean-Pierre Lentin : Dès la découverte de l’électromagnétisme, certains pensent à ses effets sur le vivant, positifs ou négatifs. Des appareils de thérapie électromagnétique apparaissent vers 1880, et des recherches un peu plus sérieuses commencent quelques décennies plus tard. Et là, première surprise et premier élément de réponse : c’est essentiellement la science soviétique qui s’intéresse à ce domaine, donnant aujourd’hui à la Russie une avance certaine. Pour expliquer le retard pris par l’Occident, il faut en effet tenir compte de l’énorme pression exercée en faveur de la chimie pharmaceutique, dont les premiers succès datent de la même époque. Citons le cas emblématique de John D. Rockfeller qui, après avoir fait fortune dans l’industrie minière et pétrolière, s’est reconverti dans l’industrie chimique. Voyant l’énorme potentialité de l’industrie pharmaceutique à base de chimie, il a investi massivement dans la recherche médicale. Il a inondé les universités de crédits, de bourses, de subventions, alors que jusque là les industriels le faisaient peu. De fait, le système de financement privé de la science aux Etats-Unis a incité les chercheurs à se consacrer à la recherche chimique. On compte ainsi plusieurs cas connus de répression ou de suppression active des recherches dans les domaines qui concurrençaient le modèle chimique. De leur côté, les compagnies industrielles basées sur l’électricité (ou les armées, avec les radars) n’avaient pas intérêt à conduire ou à financer des études risquant de prouver que les champs magnétiques et électriques ont un effet sur la santé. Cela faisait beaucoup pour une discipline à peine naissante ! L’étude du bio-électromagnétisme s’est donc très peu développée en Occident, et toujours grâce à des chercheurs marginaux ou à des scientifiques qui, bien que plus conventionnels, étaient isolés dans leur université et considérés comme des gens un peu bizarres.
Application de la "couronne" inventée par Boris Bourenko, à l'origine à l'usage des cosmonautes. Les électrons diffusent des micro-courants électriques sur des zones "réflexes" de la tête.
N.C. : C’est donc de Russie, ou plutôt d’Union Soviétique, que sont venues les découvertes ?
J.-P. L. : La réputation de la science soviétique n’est plus à faire, malgré la bureaucratie ou les lubies de dirigeants qui, parfois, faisaient se fourvoyer tout un secteur, comme Lyssenko avec la génétique. Un chercheur qui ne se heurtait pas de front à ces interdits disposait d’une certaine liberté. Quand il s’est agi de mesurer les effets de l’électromagnétisme sur la santé, par exemple, l’intérêt scientifique a rencontré l’idéologie prônant la protection du travailleur, et les résultats ne se sont pas fait attendre : les normes de sécurité sont aujourd’hui encore en Russie beaucoup plus draconiennes que chez nous. L’armée, quant à elle, ne s’en est pas souciée, puisqu’elle avait de toute façon tous les droits. (On sait qu’aux Etats-Unis l’armée a d’abord financé puis étouffé les études sur les effets des émissions radar de forte puissance en zone habitée.) D’autre part, la recherche d’utilisations thérapeutiques était favorisée par la pénurie chronique de médicaments.
Laurence Lentin : Nous savions donc que la recherche russe était en avance. La deuxième surprise, et le deuxième sujet de notre reportage, c’est que nous ignorions à quel point : à Moscou, à Saint-Petersbourg, à Kiev en Ukraine (les trois écoles les plus réputées) comme dans toute l’ex-Union Soviétique, la thérapie électromagnétique est couramment employée pour de multiples applications, dans les hôpitaux publics et dans des centres privés. Et, au dire de tous les médecins, avec un grand succès.
N.C. : Dans quels domaines ?
J.-P. L. : C’est un vivier énorme. Pour notre enquête, nous avons fait un tri en nous adressant aux personnalités russes les plus reconnues, recroisant nos informations auprès d’autres experts mondiaux de la discipline réunis lors du congrès international de bio-électromagnétisme à Munich. Nous avons finalement retenu quatre techniques principales. En premier lieu vient la thérapie par les ondes millimétriques, des micro-ondes d’une fréquence encore plus rapide que les micro-ondes classiques (au-delà de 5 gigaHertz, contre 2,5 gigaHertz pour un four, de 0,9 à 1,8 gigaHertz pour le téléphone portable et 3 ou 4 gigaHertz pour le prochain système de téléphonie mobile UMTS). Les Français ont été parmi les premiers à découvrir ces ondes, mais très rapidement ce sont les Russes qui en sont devenus les spécialistes, construisant des émetteurs reconnus comme les meilleurs du monde. Particulièrement difficiles à créer, les ondes millimétriques ont servi aux radars (plus une onde est rapide, plus elle est pénétrante), puis à l’analyse des matériaux. Les Russes, avec leur culture en bio-électromagnétisme, se sont demandés dès les années 60 quels effets elles pouvaient avoir sur le vivant. Ils ont soumis à leur rayonnement des levures, des algues, des cultures de cellules. Bingo ! Pour certaines fréquences très précises, ils obtenaient des doublements, des triplements, voire des décuplements de la croissance cellulaire. Leurs premières utilisations médicales ont été conduites par l’institut de cancérologie et on s’en sert largement aujourd’hui, non pour combattre le cancer directement, mais pour aider l’organisme à résister aux radiations et à la chimio. Les médecins ont aussi travaillé sur la cicatrisation, la repousse des os, la réduction des oedèmes et des inflammations, les maladies de peau et les affections qualifiées là-bas de neurologiques et chez nous de rhumatismales : arthrose, tendinite, mal au dos, etc.
L. L. : Il faut voir, à Moscou, l’impressionnant Hôpital N° 15, qui ressemble à une immense barre HLM, où nous avons rencontré la grande spécialiste des ondes millimétriques, Natalia Lebedeva, et sa fille Anastassia qui dirige le service de cardiologie. C’est là qu’on envoie les Moscovites victimes d’un infarctus, tous sont traités à l’aide d’une petite machine à ondes millimétriques, dont on a constaté qu’elles ralentissaient les battements cardiaques et aidaient le muscle à récupérer. Elles stimulent la réparation des tissus, ont un effet antioxydant, renforcent la capacité des cellules à résister à l’infection et à l’inflammation.
N.C. : Les Russes ont mené des études thérapeutiques rigoureuses, ils ont des données précises ?
J.-P. L. : Hélas ! Ils n’ont pas souvent employé nos protocoles draconiens, avec placebo et procédures en double aveugle, etc. Ils sont aussi passés un peu trop vite, au goût nos savants, des expérimentations animales aux applications humaines. Toutes les études cliniques seraient donc à refaire pour obtenir des homologations dans les pays occidentaux, un processus qui coûte très cher, ce qui nous ramène à l’ostracisme dont souffre la biologie électromagnétique (ses moyens humains et financiers sont environ mille fois inférieurs à ceux de la biologie moléculaire). Certes, dans d’autres domaines que celui des ondes millimétriques, la médecine occidentale s’est un peu ouverte aux techniques russes. Les champs magnétiques pulsés, par exemple, sont homologués aux Etats-Unis par la Food and Drug Administration depuis 1979 comme thérapie permettant de soigner les fractures particulièrement récalcitrantes (les non-union fractures). Mais il a fallu qu’un investisseur privé trouve les moyens de financer cette recherche précise, pour cette application précise.
Et en France les orthopédistes ne veulent toujours pas en entendre parler !
L. L. : A l’institut de biophysique cellulaire de Pouschino, la grande cité scientifique à 100 km de Moscou, on a déjà dépassé tout ça, même si les locaux tombent en ruine et que les laboratoires sont dépeuplés - il faut dire que la recherche russe est aujourd’hui dans une misère noire, un chercheur gagne à peine cent dollars par mois ! Et pourtant, ils sont en train d’obtenir des résultats contre le cancer et la maladie d’Alzheimer, avec des champs magnétiques pulsés de très faible intensité.
J.-P. L. : En Occident, il y une seule autre application pour les champs magnétiques, cette fois très intenses : en neuropsychiatrie, ils semblent avoir un effet sur les dépressions graves. Cette méthode découverte par les Américains est depuis peu à l’essai à Paris (à la Salpétrière), à Créteil et à Lyon.
Jean-Marie Danze, consultant en biophysique, un des meilleurs experts européens en pollutions électromagnétiques, mesure le champ magnétique sous une ligne à haute tension. Pour lui les basses fréquences artificielles interfèrent avec les basses fréquences naturelles (autour de 12 Hertz) émises par le cerveau.
N.C. : Vous voyez bien que l’on s’y met, et personne ne se plaindra d’un luxe de précautions ! N’y aurait-il pas des raisons plus fondamentales, liées à cette discipline elle-même, pour expliquer les réticences occidentales ?
J.-P. L. : Bien sûr, il y a de nombreux problèmes.
D’abord, la complexité des phénomènes en biologie cellulaire rend les expériences extrêmement difficiles à reproduire d’un labo à l’autre. Une des raisons, c’est que le champ magnétique terrestre entre en ligne de compte, d’une manière qu’on ne sait absolument pas quantifier, et que ce champ varie géographiquement, il est aussi modifié par les bâtiments, donc il n’est jamais identique d’un endroit à l’autre. Certains chercheurs estiment qu’ils faudrait faire les expériences à -600 mètres, pour que le champ magnétique ne subisse aucune influence ! Mais le problème est aussi médical : la médecine russe partage avec la médecine chinoise une vision énergétique de l’être vivant. Les différentes techniques électromagnétiques s’appliquent en des points précis, issus de la “réflexothérapie”, nom que les Russes donnent à l’acupuncture. Quand on sait que celle-ci tient encore du charlatanisme aux yeux de notre médecine officielle, on comprend la difficulté !
La troisième technique importante employée en thérapie, après les ondes millimétriques et les champs magnétiques pulsés, offre un excellent exemple de l’incompréhension qui règne ici. Il s’agit des courants électriques, que l’Occident connaît bien puisqu’ils servent notamment aux kinésithérapeutes pour calmer la douleur (les stimulateurs électriques nerveux transcutanés).
Ça chauffe un peu, le courant est assez fort, une utilisation prolongée annule les effets à cause de l’accoutumance, et à la longue ça peut être cancérigène. Mais ça rentre dans le modèle admis : effet = échauffement. Les Russes, eux, utilisent des micro-courants électriques, mille fois moins intenses, mais appliqués sur les “zones réflexes” et les points d’acupuncture. Et ça donne des résultats spectaculaires, notamment contre les toxicomanies. Nous avons visité un centre où on soigne le tabagisme et l’alcoolisme, avec une espèce de couronne électrique inventée dans les années 70 par un ingénieur du spatial, Boris Bourenko, initialement pour soigner les cosmonautes victimes du mal de l’espace. Les Russes s’inspirent aussi, parfois, de découvertes occidentales en médecine alternative, mais ils les développent et elles rejoignent vite la médecine officielle. Dès qu’il y a des résultats, ces médecines sont homologuées par le Ministère de la Santé, même si leurs principes restent assez mystérieux. C’est le cas, à Moscou, du centre IMEDIS de Youri Gotovsky, à partir d’une technique créée dans les années 60 par un Allemand, Reinholdt Voll, qui consiste à mesurer la résistivité des points d’acupuncture par rapport à une valeur normale, puis à rétablir l’équilibre. L’électro-acupuncture et ses rejetons comme les méthodes Mora, Vega ou Bicom, malgré leur succès en Allemagne et en Autriche, sont toujours restées des thérapies alternatives en Occident. Car là, on entre de plain pied dans le cœur du problème : on débouche directement sur l’homéopathie !
N.C. : Pourquoi est-ce le cœur du problème ?
L. L. : Parce que ces thérapies reposent sur l’idée d’une bio-résonance électromagnétique. C’est un apport d’information à l’organisme, et non un processus mécanique comme en chimie médicamenteuse. Les Russes, et aussi les Ukrainiens qui sont très en pointe dans ce domaine, ont informatisé le diagnostic issu des points d’acupuncture et de la détection des ondes émises naturellement par le corps. Et ils vont encore plus loin, ils enregistrent sous forme électromagnétique la “signature” des substances à prescrire, et à la fin de la consultation le médecin branche une petite machine, y place des granules neutres de saccharose et les irradie avec les fréquences de ces substances, numérisées dans l’ordinateur. C’est de l’homéopathie électromagnétique.
N.C. : Et pour espérer comprendre un jour, il faut dépasser notre vision chimique moléculaire du vivant, de l’homme, de la médecine, et adopter une vision électromagnétique ?
J.-P. L. : C’est à notre avis l’étape suivante. En termes de communication, le modèle chimique de la clé et de la serrure est insuffisant : il faut une molécule qui s’emboîte dans une autre molécule pour déclencher un processus, cela devient vite un peu fou, car il y a des milliards de molécules dans une cellule, et de nombreux phénomènes restent inexplicables. A l’évidence, il existe d’autres méthodes de communication plus performantes. La preuve, c’est que nous nous en servons pour communiquer dans le monde entier avec nos portables, nos radios, nos télés, etc. Pourquoi le vivant ne ferait-il pas pareil ? Quoi de mieux, pour communiquer, que d’émettre une fréquence que seuls les “bons” détecteurs cellulaires capteront, par résonance, déclenchant une réaction ciblée ? Au congrès de Munich, le sujet de questionnement principal était : “S’il n’y a pas d’échauffement, alors qu’est-ce que c’est ?”. C’est de l’information, en fait, un signal reconnu par la cellule. Et cette notion ne “passe” pas facilement ! A propos des ondes millimétriques, les Russes avancent pourtant une hypothèse intéressante. Souvenons-nous que les étoiles, pour nous principalement le soleil, émettent sur toutes les longueurs d’onde, à toutes les fréquences. Or, les ondes millimétriques sont pratiquement les seules à être entièrement absorbées par l’eau dans la haute atmosphère. Sur Terre, elles sont totalement absentes de l’environnement naturel. Du coup, celles émises par la matière vivante rencontrent moins d’interférence, moins de brouillage. Le vivant les aurait-il “choisies” précisément pour cette raison, pour servir de véhicule à ses communications ? Autre piste proposée depuis les années 60 par l’institut de biophysique de Pouschino et portant sur l’activité cellulaire elle-même : on sait que l’un des facteurs de régulation de cette activité est la quantité d’ions calcium qui traversent la membrane cellulaire. Ces ions entrent et sortent selon un rythme connu, cyclique. Il n’est pas difficile de supposer que ce rythme puisse être affecté par d’autres phénomènes cycliques : il suffit qu’une oscillation de même fréquence, ou multiple ou sous-multiple de cette fréquence, entre en résonance ou en interférence, et inhibe ou augmente le rythme naturel.
L. L. : A l’Hôpital 23 de Moscou, une bâtisse lugubre et complètement délabrée, le docteur Yossif Blinkov a appliqué ce raisonnement aux organes eux-mêmes, suite d’ailleurs à des travaux de médecins franàais totalement inconnus ici, Ferrer et Saulnier de Marantes. Nos organes ne sont pas seulement soumis à des rythmes circadiens, mais aussi à des rythmes internes, en Hertz (un Hertz, c’est un cycle par seconde) ou en fractions de Hertz, parfaitement réguliers. Blinkov a mis au point des appareils magnétiques pour restaurer le rythme naturel de différents organes, et nous avons vu sa collaboratrice Ludmilla Khazina les appliquer dans son centre de réflexothérapie - un centre semi-privé, très différent des hôpitaux, très clean et moderne. Avec ça, elle soigne absolument tous les types de maladies, parce que, comme elle dit, “ le corps retrouve la mémoire perdue de ce qui lui fait du bien”.
N.C. : Est-ce que les Russes ont une théorie générale à proposer ?
J.-P. L. : On en est encore loin. Certains parlent de signalétique cellulaire, de macromolécules servant d’émetteurs et/ou de capteurs. Mais il y a un fait très curieux : presque tous nos interlocuteurs, sans même que nous le leur demandions, nous ont parlé de l’eau. Oleg Bietski, à l’Institut de Radiotechnique, nous a montré fièrement un appareil tout nouveau, “AquaStim”, un dynamiseur d’eau par ondes millimétriques. Selon lui, l’eau traitée peut être bue pour renforcer l’immunité, et en application locale elle est cicatrisante. Yossif Blinkov a lui aussi inventé un dynamiseur d’eau, qui produit ce qu’il appelle de “l’eau vivante”. Mieux encore : Evgueni Fessenko, un savant de réputation mondiale, le directeur de l’institut de Pouschino, ne se contente pas d’envoyer des ondes millimétriques pour stimuler ou inhiber le passage des ions calciums ou l’activité des cellules immunitaires. Il affirme avoir démontré qu’on obtient des effets identiques en baignant les cellules avec une eau qui a été préalablement irradiée par ces mêmes ondes.
L. L. : Peut-être aviez-vous déjà pensé, quand j’ai mentionné l’homéopathie électromagnétique, à Jacques Benveniste. Eh bien, sans toujours connaître son nom, les chercheurs russes nous ont répondu comme une évidence : “Mais bien sûr, tout est dans la mémoire de l’eau !”.
J.-P. L. : Conclusion : pour aller plus loin dans la compréhension de ces effets il faudra investir massivement et étudier la structure moléculaire de l’eau, dont on ne sait presque rien. Autrement dit, il serait temps d’y mettre les moyens. Mais il faut surtout changer toute notre vision de la biologie ! •
SOURCE / http://www.nouvellescles.com