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«L'avenir n'est plus ce qu'il était» [Paul Valéry]



Alerte : la France sabote la taxation des transactions financières !

Le Monde.fr | 11.07.2013. Par Dominique Plihon (Porte-parole d'Attac France) et Peter Wahl (Président de l'ONG allemande WEED)
En catimini, notre actuel ministre des finances, de gauche parait-il, et ses équipes font tout ce qu'il faut pour vider de sa substance la fameuse taxe Tobin que la France avait pourtant soutenu quand Sarkozy était président. On attend le recadrage de l'actuel président (qui ne viendra pas, soyez-en sûr)



Pour Moscovici ce sera 0.001 % !
Pour Moscovici ce sera 0.001 % !
La France avait soutenu l'introduction d'une taxe sur les transactions financières (TTF) à l'échelle européenne sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Lorsqu'il était devenu clair que la TTF ne serait pas acceptée par les 27 Etats membres de l'UE – la Grande Bretagne, la Suède et le Luxembourg étaient farouchement contre – un groupe de onze pays, dont l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, l'Espagne, la France et l'Italie - a choisi la méthode de la "coopération renforcée" pour introduire la taxe en s'appuyant sur le projet de directive de la Commission. Le projet de la Commission n'était certes pas parfait, mais il constituait un pas en avant important, et bénéficiait du soutien de la société civile. La France avait activement soutenu cette initiative. François Hollande s'était énergiquement prononcé pour la TTF dans sa campagne électorale.
Lire aussi Moscovici prend ses distances avec la taxe sur les transactions financières

Lorsque le groupe de travail prévu par la procédure de coopération renforcée avait commencé ses négociations en février dernier, il apparaissait que la France, représentée à l'époque par le Ministère du budget, allait jouer un rôle constructif. Après le départ de Jérôme Cahuzac, le ministère des finances a pris en charge ce dossier. Depuis lors, la France a fait machine arrière et semble avoir rallié le camp des adversaires de la taxe. Alors qu'il déclare publiquement défendre la TTF, le ministère français exige en coulisse des exceptions qui, prises ensemble, feraient de la taxe une farce sans effet régulateur qui ne produirait que des recettes ridiculement faibles !

Lors de la réunion du groupe de travail, le 22 mai, le ministère a ainsi déclaré voir beaucoup de problèmes dans la proposition de la Commission et a demandé l'introduction d'amendements d'une portée considérable. Le ministère des finances français remet en cause les points suivants :

Le principe d'origine. Le projet de la Commission prévoit plusieurs mesures contre l'évasion fiscale, dont le premier est le principe d'origine. Cela veut dire qu'une banque française est taxée même si elle fait une transaction en dehors de l'Union européenne, par exemple à New York. En complément de ce principe, la Commission veut taxer selon le principe d'émission. Ici, le critère est l'origine de l'instrument, et non pas de l'institution financière. C'est-à-dire qu'une action de Renault vendue à Hongkong par une banque japonaise serait aussi taxée. Le ministère français ne veut appliquer que le principe d'émission. Mais puisque la plupart des produits dérivés sont traités sur des marchés de gré à gré et ne donnent pas lieu à émission, la position française permettrait à une part importante des transactions d'échapper à la taxation.

La taxation de chaque transaction. Tandis que la Commission propose de taxer chaque transaction, le ministère français veut taxer les opérations après compensation. Cela signifie que la taxe ne serait prélevée qu'une fois par jour, à la clôture du marché. En ce cas, les revenus ne seraient qu'un petit pourcentage de ceux obtenus par la première méthode ; la TTF perdrait son effet régulateur, en particulier sur les transactions à haute fréquence.

La taxation des vendeurs et acheteurs. Le projet de la Commission prévoit la taxation sur les deux bouts d'une transaction, c'est-à-dire que le vendeur et l'acheteur doivent payer. Le ministère français demande de ne taxer que les vendeurs, réduisant ainsi de moitié les recettes fiscales.
La taxation au sein d'un groupe. Le projet de la Commission souhaite taxer les transactions au sein d'un groupe, par exemple entre la maison-mère et ses filiales. Le ministère de finances français est contre cette proposition.

La valeur nominale des dérivés. La Commission propose de taxer un produit dérivé selon la valeur nominale couverte par le produit, et non pas selon le prix du produit lui-même. Si Paribas par exemple vend une option pour l'achat d'actions dans deux mois pour cent millions d'euros, ce seront les cent millions qui sont taxés. Le prix de l'option se situe normalement entre 3 % et 5 % de la valeur nominale. La proposition française signifierait donc une réduction de la taxe d'au moins 95 %.

Le "Repos". Enfin, la France demande que les « repos » (opérations de pension) soient exemptés de la TTF. Les "repos" sont des crédits à très court terme (quelques heures ou une nuit) entre banques, qui sont généralement utilisés pour financer des opérations spéculatives. Juridiquement, les "repos" sont – à juste titre - considérés comme des transactions. Ils doivent donc être assujettis à la TTF. L'exemption des "repos" serait une prime à l'économie de casino que souhaite combattre la TTF.

Ce recul de la France a eu lieu derrière les portes closes d'une négociation sans aucune transparence, ni légitimation démocratique. L'Assemblée nationale ne semble pas être au courant. Bien sûr, il ne s'agit pour le moment que de négociations techniques entre hauts fonctionnaires. Mais si le gouvernement Ayrault valide la position régressive de Bercy, cela signifiera qu'il a capitulé sous la pression du Medef et de la Fédération française des banques pour qui la TTF serait "destructrice de richesse". La TTF serait alors une caricature de la proposition de la Commission.

Dominique Plihon (Porte-parole d'Attac France) et Peter Wahl (Président de l'ONG allemande WEED)

Mosco...vici ? Non : Veni, Vidi et Vinctus (sum) Et en plus, il est content de lui !
Mosco...vici ? Non : Veni, Vidi et Vinctus (sum) Et en plus, il est content de lui !
Un autre article, d'une sénatrice P.S, cette fois. Encore plus explicite.

© AFP

Alors que Pierre Moscovici qualifie d’« excessif » le projet de taxe sur les transactions financières porté par Bruxelles, la sénatrice PS Marie-Noëlle Lienemann trouve cela « effarant ». « C’est quand même un comble que la Commission apparaisse plus à gauche que la France », selon la sénatrice de Paris. Elle demande de « ponctionner fortement » les 500 Français les plus riches qui viennent de voir leur fortune augmenter de 25 % en un an. Entretien.

Le projet de taxe sur les transactions financières porté par Bruxelles est « excessif » affirme le ministre de l’Economie Pierre Moscovici. Quelle est votre réaction ?
Je trouve ça effarant. Etre doublé à gauche par la Commission européenne, il faut le faire quand même. Surtout pour un gouvernement socialiste. Je ne comprends pas. Que la France propose une modulation un peu différenciée de la taxe, avec peut-être un peu plus sur les produits dérivés et un peu moins sur les obligations d’Etat, ce n’est pas absurde. Mais ça ne doit pas se faire dans une stratégie de recul. Il faut plutôt une consolidation, avec au moins un produit de la taxe de 35 milliards d’euros.

Pierre Moscovici souligne la nécessité d’« être pragmatique et réaliste »…
Le pragmatisme qui vise à dire on va moins taxer, c’est le vieux débat. On met en avant le fait que l’Europe serait moins concurrentielle. Mais ça n’a pas de sens. Nous avons quand même en France parmi les plus grandes banques au monde. L’attractivité de la finance européenne se fait sur d’autres critères. Ce qui manque pour financer l’économie française, c’est plutôt un projet d’avenir en matière industrielle et une capacité à porter un nouveau modèle de développement. Le pragmatisme serait aussi d’avoir une taxe exceptionnelle pour tous les millionnaires qui viennent d’être renforcés. Là, j’aimerais beaucoup de pragmatisme. Le pragmatisme serait de ponctionner fortement cet enrichissement des 500 plus grandes fortunes françaises.

C’était le but de la taxe à 75 %, avant qu’elle ne soit invalidée par le Conseil constitutionnel…
Il y a la taxe à 75 %, mais il faut trouver un autre système. J’attends du gouvernement une proposition pour prélever une partie des 25 % (l’augmentation de la richesse des 500 plus grandes fortunes en un an, ndlr) pour participer à la réduction du déficit.

Si la France reculait sur la taxe sur les transactions financières, ce serait une déception ?
Oui, ce serait une déception qu’on recule à cause de nous. Bonjour l’image de la France ! La gauche s’est mobilisée depuis des lustres sur ce sujet. Il est fondamental que François Hollande recadre Pierre Moscovici pour que le ministre défende l’idée d’appliquer avec force et vigueur une taxe qui était dans son programme.

Mais Pierre Moscovici ne conduit pas sa politique seul….
Arnaud Montebourg non plus. Il n’y a pas ce qu’on demande aux uns et ce qu’on demande aux autres. Il n’y a pas les chouchous et les autres.

Pierre Moscovici a-t-il succombé au lobby bancaire ?
Bien sûr. Ce n’est pas la première fois. La loi sur la séparation des activités bancaires aurait pu aller plus loin. C’est d’autant plus surprenant qu’il y a un sujet bancaire qui reste un non-dit des débats européens : la masse des crédits douteux qui restent dans le circuit bancaire. Ce n’est pas en succombant au lobby des banques qu’on va régler ces problèmes de fond. Ce n’est pas en faisant payer les citoyens par l’impôt, faute de taxer les mouvements de capitaux, qu’on va régler les problèmes.

Avec la gauche du Parti socialiste, vous appelez de vos vœux une autre politique. Mais le ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll, a affirmé que « changer de cap serait une erreur »…
Là, il ne s’agit pas de changer de cap, mais de tenir un engagement de François Hollande. On ne nous avait pas dit que la taxe sur les transactions financières devait se faire à minima. Et il ne serait pas scandaleux de prélever sur l’enrichissement massif des 500 Français les plus fortunés. Un an de gauche et il ya plus de 25 % d’enrichissement des plus riches ! Il y a des mesures fiscales à prendre. Si ce ne sont pas les 75%, il y a d’autres possibilités, comme rétablir la double fiscalité sur les dividendes élevés.

Entre la loi de séparation des activités bancaires à minima et un recul qui s’annonce sur la taxe sur les transactions financières, quelle est selon vous le rapport de François Hollande à la finance finalement ?
Je ne suis pas là pour faire de la psychologie. Mais dans les faits, nous ne sommes pas encore au niveau de ce qui est normal d’envisager au regard de la montée de la finance et de la fragilité de l’économie réelle. Il y a des pas positifs, mais les moyens ne sont pas suffisants. C’est quand même un comble que la Commission européenne apparaisse plus à gauche et redistributive que la France. Là, je tombe raide, quand je connais la position libérale de ces institutions. Je vois déjà le sourire de Barroso. Politiquement, on se fragilise.

N.D.L.R

Un ministre de gauche qui se bat contre la taxation des tractations (!) financières ! Elle est carabinée, celle-là non ?

Déjà un ministre des finances qui milite (!) pour baisser une rentrée de taxes, au départ non négligeable, par les temps qui courent, ce n'est pas commun.

Mais, en plus, le premier collaborateur d'un président qui a été élu essentiellement parce qu'il avait déclaré la guerre à la finance, qui vide un projet de taxe Tobin de sa substance, sans se faire recadrer sur le champs par son patron, lequel n'a pas hésité longtemps avec sa ministre de l'écologie (!) voilà vraiment de quoi décourager définitivement l'électorat de gauche. Déjà réduit, en ce qui concerne la confiance en Hollande, à une peau de chagrin. Expression Ô combien adaptée à la situation actuelle.

Si vous vouliez une preuve supplémentaire de la collusion entre le pouvoir actuel et les forces de l'argent, vous voilà fixés.

Avec Mitterrand il avait fallu quand même un certain temps avant que la gauche ne se caviardise. Avec Hollande la gauche au pouvoir ne se contente plus de se sucrer au passage, elle est carrément devenue plus libérale que les plus libéraux. Jusque dans les plus hautes sphères du pouvoir.

Comme le chantait Coluche : Misère ! Misère !

Lundi 15 Juillet 2013

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