
Enquête sur les travers du management à la française
Soixante-quinze ans après les recommandations d'experts américains pointant déjà du doigt un manque d'autonomie et d'attention aux facteurs humains dans les entreprises françaises, où en est-on ? La réponse, basée sur une enquête d'Alternatives Economiques, est sans appel : les travers persistent.
Un héritage tenace : du taylorisme à la financiarisation
L'article met en lumière plusieurs facteurs expliquant cette spécificité française. Dès la fin du XIXe siècle, le taylorisme s'est implanté durablement, favorisant une division stricte du travail et une hiérarchie centralisée. Plus tard, un système éducatif élitiste, valorisant les diplômés des grandes écoles, a contribué à perpétuer un management basé sur le diplôme plutôt que sur l'expérience du terrain.
Aujourd'hui, de nouvelles structures économiques, notamment la financiarisation des entreprises et l'omniprésence du numérique, renforcent cette verticalité. La pression des actionnaires et des marchés financiers conduit à un management par les chiffres, éloignant les cadres du travail réel et des besoins des salariés.
Des conséquences bien réelles : mal-être, perte de productivité et d'innovation
Ce management "à la française" a des répercussions concrètes et négatives. Le manque d'autonomie et de participation des salariés aux décisions importantes est flagrant, plaçant la France loin derrière les pays scandinaves et même la moyenne européenne.
Cette situation engendre un mal-être au travail, illustré par le recours accru au reporting et aux objectifs chiffrés, au détriment de la qualité du travail et des relations humaines. Le cas emblématique de France Télécom, condamnée pour harcèlement moral institutionnel, témoigne des dérives extrêmes de ce modèle.
Finalement, ce management dépassé freine l'innovation et plombe la productivité de l'Hexagone, représentant des pertes colossales pour l'économie française.
Des alternatives timides et parfois illusoires
Face à ce constat, des alternatives émergent : intrapreneuriat, entreprises libérées, start-up... Ces modèles prônent plus de liberté et de participation pour les salariés. Cependant, l'enquête met en garde contre des limites et des dérives possibles, notamment une individualisation des relations managériales pouvant ouvrir la voie à un management toxique.
L'espoir d'un changement ?
Malgré un tableau sombre, l'article conclut sur une note d'optimisme. La crise du Covid et les difficultés de recrutement ont mis en lumière l'importance de la qualité du management, notamment pour attirer les nouvelles générations.
Reste à savoir si cette prise de conscience sera suffisante pour transformer en profondeur les pratiques managériales en France. Une chose est sûre : le modèle actuel montre ses limites et un changement de cap semble indispensable pour l'avenir des entreprises françaises.
Le rapport de l'Inspection générale des Affaires sociales (Igas) a révélé que les pratiques managériales en France sont considérées comme « peu flatteuses » et « médiocres » par rapport à celles en vigueur en Allemagne, Suède, Italieet Irlande, ce qui constitue un frein au développement économique du pays.
- Les caractéristiques du management à la française incluent une verticalité, un autoritarisme et un manque de coopération, ce qui entraîne une autonomie réduite des salariés français par rapport à leurs voisins et une méfiance envers leurs managers, qui ne savent ni reconnaître le travail accompli ni exprimer leur gratitude.
- Les inspecteurs de l’Igas préconisent une meilleure formation des encadrants et la création d’un programme national de soutien à l’innovation managériale et à la qualité de vie au travail, qui pourrait être financé en partie par des fonds européens, afin de remédier à ces problèmes.
- D’autres pistes, telles que l’intégration de la question du management dans les négociations annuelles obligatoires ou l’association des représentants du personnel et des salariés au débat, semblent plus difficiles à mettre en œuvre en raison de la relation de subordination entre les employeurs et les employés.
- Le rapport se limite au secteur privé, en analysant quatre secteurs d’activité, à savoir l’automobile, le numérique, l’assurance et l’hôtellerie-restauration, mais il serait intéressant d’examiner également la sphère publique, où le management ne brille pas non plus par son degré de confiance, comme en témoigne la pratique du télétravail dans les administrations.
- Le management autoritaire à la française est dénoncé, notamment en ce qui concerne le manque d'exemplarité d'un management démocratique et participatif au sommet de l'Etat, avec François Bayrou étant considéré comme un exemple de ce problème.
- François Bayrou a promis un changement de méthode à l'égard des partenaires sociaux, mais ses actions ultérieures, telles que sa déclaration selon laquelle il n'est pas question de revenir à un âge légal de 62 ans, ont provoqué des critiques et des claquements de porte en série de la part des syndicats.
- Les syndicats, tels que Force ouvrière et la CGT, ont quitté les négociations en raison de la remise en cause de la parole donnée par François Bayrou, tandis que l'U2P a déserté la table des négociations pour des raisons inverses, craignant que les discussions ne prennent une tournure qui pourrait remettre en cause les 62 ans.
- La CFDT participe toujours aux négociations, mais il est possible qu'elle jette l'éponge à son tour, ce qui alimenterait la défiance à l'égard de tous les personnels de direction et renforcerait la marque de fabrique française de management autoritaire.
- Simone Weil a déjà critiqué François Bayrou en 2007, le qualifiant de "pire que tout" en raison de son passé et de ses trahisons successives, ce qui souligne le manque de confiance envers Bayrou et son style de management.
« Les poissons pourrissent toujours par la tête ». Version populaire
« Les problèmes d'une organisation commencent par ceux qui la dirigent ». Version think tank