Les Gardiens de la Constitution française cantonnent la future haute autorité de lutte anti-piratage à un rôle d'avertisseur. Christine Albanel compte ajuster le dispositif.
Un article de Philippe Guerrier dans Vnunet.fr du 11-06-2009
L'examen de la loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet (surnommée Hadopi par ses détracteurs) est inépuisable...en surprises. Dernier rebondissement : le Conseil constitutionnel a censuré en partie le texte orienté lutte anti-piratage.
Les Sages ont même remis en cause le coeur du dispositif : la riposte graduée. Cela commence par des avertissements adressés aux contrevenants qui flirtent un peu trop avec les réseaux P2P jugés illégaux et cela finit par une coupure de l'accès Internet.
Après l'adoption de la loi par le Parlement, plus de soixante députés (dont une grande proportion issue de la gauche et du PS) avaient effectué le 19 mai une saisine.
Dans sa décision en date du 10 juin, le Conseil constitutionnel a amendé le texte en mettant en avant la liberté de communication et d'expression, énoncée à l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Rien que cela.
Liberté d'accéder aux services en ligne
"Cette liberté implique aujourd'hui, eu égard au développement généralisé d'internet et à son importance pour la participation à la vie démocratique et à l'expression des idées et des opinions, la liberté d'accéder à ces services de communication au public en ligne", estiment les Sages en charge de veiller au strict respect de la Constitution française.
Le Conseil constitutionnel n'apprécie guère les prérogatives d'attribution de sanctions de la commission Hadopi (restriction voire suspension de l'accès à Internet à des titulaires d'abonnement).
"Ces pouvoirs pouvaient donc conduire à restreindre l'exercice, par toute personne, de son droit de s'exprimer et de communiquer librement (...) Ces pouvoirs ne peuvent incomber qu'au juge", peut-on lire dans le communiqué de presse.
Le principe de la présomption d'innocence serait donc lésé. "En méconnaissance de l'article 9 de la Déclaration de 1789, la loi instituait ainsi, en opérant un renversement de la charge de la preuve, une présomption de culpabilité pouvant conduire à prononcer contre l'abonné des sanctions privatives ou restrictives du droit."
Néanmoins, le Conseil constitutionnel ne s'oppose pas aux pouvoirs d'avertissement confiés à la Hadopi. Mais sa mission est clairement réduite : "cette autorité ne dispose plus que d'un rôle préalable à une procédure judiciaire (...) [Son rôle est] d'avertir le téléchargeur qu'il a été repéré, mais pas de le sanctionner."
La loi "sera complétée"
De son côté, Christine Albanel, ministre de la Culture, a perdu le sourire qu'elle arborait dimanche soir pour fêter la victoire de l'UMP à l'élection européenne.
Dans un communiqué de presse, elle regrette de ne pouvoir "aller jusqu’au bout de la logique de 'dépénalisation' du comportement des internautes, en confiant à une autorité non judiciaire toutes les étapes - y compris le prononcé de la sanction - du processus". Mais elle ne baisse pas les bras pour autant.
Des propositions seront avancées pour "compléter rapidement la loi Création et Internet et confier au juge le dernier stade de la réponse graduée". Christine Albanel maintient que les premiers messages d’avertissement seront adressés dès l’automne aux abonnés à Internet. Son intention survira-t-elle au prochain remaniement gouvernemental ?
P.S
Pour dame Albanel remplacer le juge par une commission à la botte du gouvernement c'est dépénaliser le comportement des internautes. Elle ne manque pas d'air cette dame !
Prochaine étape : dans le cadre de la dépénalisation de la société française Sarkozy demande la suppression du conseil constitutionnel ? Juste avant de se faire sacrer empereur ?
Un article de Philippe Guerrier dans Vnunet.fr du 11-06-2009
L'examen de la loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet (surnommée Hadopi par ses détracteurs) est inépuisable...en surprises. Dernier rebondissement : le Conseil constitutionnel a censuré en partie le texte orienté lutte anti-piratage.
Les Sages ont même remis en cause le coeur du dispositif : la riposte graduée. Cela commence par des avertissements adressés aux contrevenants qui flirtent un peu trop avec les réseaux P2P jugés illégaux et cela finit par une coupure de l'accès Internet.
Après l'adoption de la loi par le Parlement, plus de soixante députés (dont une grande proportion issue de la gauche et du PS) avaient effectué le 19 mai une saisine.
Dans sa décision en date du 10 juin, le Conseil constitutionnel a amendé le texte en mettant en avant la liberté de communication et d'expression, énoncée à l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Rien que cela.
Liberté d'accéder aux services en ligne
"Cette liberté implique aujourd'hui, eu égard au développement généralisé d'internet et à son importance pour la participation à la vie démocratique et à l'expression des idées et des opinions, la liberté d'accéder à ces services de communication au public en ligne", estiment les Sages en charge de veiller au strict respect de la Constitution française.
Le Conseil constitutionnel n'apprécie guère les prérogatives d'attribution de sanctions de la commission Hadopi (restriction voire suspension de l'accès à Internet à des titulaires d'abonnement).
"Ces pouvoirs pouvaient donc conduire à restreindre l'exercice, par toute personne, de son droit de s'exprimer et de communiquer librement (...) Ces pouvoirs ne peuvent incomber qu'au juge", peut-on lire dans le communiqué de presse.
Le principe de la présomption d'innocence serait donc lésé. "En méconnaissance de l'article 9 de la Déclaration de 1789, la loi instituait ainsi, en opérant un renversement de la charge de la preuve, une présomption de culpabilité pouvant conduire à prononcer contre l'abonné des sanctions privatives ou restrictives du droit."
Néanmoins, le Conseil constitutionnel ne s'oppose pas aux pouvoirs d'avertissement confiés à la Hadopi. Mais sa mission est clairement réduite : "cette autorité ne dispose plus que d'un rôle préalable à une procédure judiciaire (...) [Son rôle est] d'avertir le téléchargeur qu'il a été repéré, mais pas de le sanctionner."
La loi "sera complétée"
De son côté, Christine Albanel, ministre de la Culture, a perdu le sourire qu'elle arborait dimanche soir pour fêter la victoire de l'UMP à l'élection européenne.
Dans un communiqué de presse, elle regrette de ne pouvoir "aller jusqu’au bout de la logique de 'dépénalisation' du comportement des internautes, en confiant à une autorité non judiciaire toutes les étapes - y compris le prononcé de la sanction - du processus". Mais elle ne baisse pas les bras pour autant.
Des propositions seront avancées pour "compléter rapidement la loi Création et Internet et confier au juge le dernier stade de la réponse graduée". Christine Albanel maintient que les premiers messages d’avertissement seront adressés dès l’automne aux abonnés à Internet. Son intention survira-t-elle au prochain remaniement gouvernemental ?
P.S
Pour dame Albanel remplacer le juge par une commission à la botte du gouvernement c'est dépénaliser le comportement des internautes. Elle ne manque pas d'air cette dame !
Prochaine étape : dans le cadre de la dépénalisation de la société française Sarkozy demande la suppression du conseil constitutionnel ? Juste avant de se faire sacrer empereur ?
Lu également ans Arrêt sur Limages :
Que faire lorsque la loi qu'on défend depuis des mois est vidée de son sens par une décision qui la prive de sa disposition phare ? Se réjouir... C'est en tout cas officiellement la position de la ministre de la Culture Christine Albanel. Cet après-midi, le Conseil constitutionnel a rendu une décision dévastatrice, disponible en intégralité sur son site, contre la loi Création et internet, votée définitivement par le Parlement le 12 mai.
Le Conseil, saisi par les députés socialistes le 19 mai dernier, a jugé que le cœur même de la loi, la riposte graduée, était anticonstitutionnel. Il a d'abord établi, et c'est une première en France, que l'accès à internet est un droit fondamental : "La liberté de communication et d'expression, énoncée à l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, (...) implique aujourd'hui, eu égard au développement généralisé d'internet et à son importance pour la participation à la vie démocratique et à l'expression des idées et des opinions, la liberté d'accéder à ces services de communication au public en ligne."
Le Conseil a également estimé qu'il était contraire à la constitution de demander à un internaute de prouver qu'il était innocent si son adresse IP était repérée lors d'un téléchargement. Conclusion : "Le rôle de la Haute autorité (Hadopi) est d'avertir la téléchargeur qu'il a été repéré, mais pas de le sanctionner", cette tâche devant être réservée à un juge.
Et pourtant, dans un communiqué, Albanel "se félicite que le principe d'un dispositif pédagogique de prévention du piratage ait été validé par le Conseil constitutionnel", puisqu'il "s'agit d'une avancée capitale dans la lutte qu'elle entend continuer à mener contre le pillage des droits des créateurs et en faveur d'un Internet civilisé". Pourtant, c'est bien le fait que le dispositif permette de se passer d'un juge qui était présenté comme la grande avancée du texte par le gouvernement.
Bien obligée de plier devant le Conseil, la ministre souhaite "compléter rapidement la loi Création et Internet pour confier au juge le dernier stade de la «réponse graduée»". Mais assure tout de même que l'Hadopi enverra ses premiers e-mails d'avertissement dès l'automne.
Que faire lorsque la loi qu'on défend depuis des mois est vidée de son sens par une décision qui la prive de sa disposition phare ? Se réjouir... C'est en tout cas officiellement la position de la ministre de la Culture Christine Albanel. Cet après-midi, le Conseil constitutionnel a rendu une décision dévastatrice, disponible en intégralité sur son site, contre la loi Création et internet, votée définitivement par le Parlement le 12 mai.
Le Conseil, saisi par les députés socialistes le 19 mai dernier, a jugé que le cœur même de la loi, la riposte graduée, était anticonstitutionnel. Il a d'abord établi, et c'est une première en France, que l'accès à internet est un droit fondamental : "La liberté de communication et d'expression, énoncée à l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, (...) implique aujourd'hui, eu égard au développement généralisé d'internet et à son importance pour la participation à la vie démocratique et à l'expression des idées et des opinions, la liberté d'accéder à ces services de communication au public en ligne."
Le Conseil a également estimé qu'il était contraire à la constitution de demander à un internaute de prouver qu'il était innocent si son adresse IP était repérée lors d'un téléchargement. Conclusion : "Le rôle de la Haute autorité (Hadopi) est d'avertir la téléchargeur qu'il a été repéré, mais pas de le sanctionner", cette tâche devant être réservée à un juge.
Et pourtant, dans un communiqué, Albanel "se félicite que le principe d'un dispositif pédagogique de prévention du piratage ait été validé par le Conseil constitutionnel", puisqu'il "s'agit d'une avancée capitale dans la lutte qu'elle entend continuer à mener contre le pillage des droits des créateurs et en faveur d'un Internet civilisé". Pourtant, c'est bien le fait que le dispositif permette de se passer d'un juge qui était présenté comme la grande avancée du texte par le gouvernement.
Bien obligée de plier devant le Conseil, la ministre souhaite "compléter rapidement la loi Création et Internet pour confier au juge le dernier stade de la «réponse graduée»". Mais assure tout de même que l'Hadopi enverra ses premiers e-mails d'avertissement dès l'automne.