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Rachida Dati et les foulards Hermès : la polémique en 3 actes

Epinglée par "Le Point" pour des dépenses indues au ministère de la Justice, Rachida Dati s’est défendue bec et ongles. Et pour cause : le rapport de la Cour des comptes ne cite nulle part son nom. Un article du NouvelObs.



Rachida Dati et les foulards Hermès : la polémique en 3 actes
Acte 1 : "Le Point" épingle Rachida Dati pour des dépenses indues

Mercredi 13 mai, l’hebdomadaire "Le Point" épingle l’ancienne ministre de la Justice Rachida Dati en raison d’une décision de la Cour des comptes qui refuse près de 9.000 euros de dépenses indues, notamment de vêtements, et 180.000 euros de dépenses de communication lorsqu'elle était au ministère.

Dans une décision publiée le 22 janvier et consultable sur son site internet, la Cour des comptes refuse au total pour près de 190.000 euros de dépenses pour la période allant de 2007 à 2010. Sur les 9.000 euros de dépenses , une partie des sommes ont servi à acheter des foulards Hermès, selon "Le Point".

La décision fait état notamment de "factures d'achat de vêtements de luxe, de consommation de boissons ou de repas, d'achats de pâtisserie, de journaux, de produits de pharmacie", mentionné sous un bordereau "frais de réception et de représentation".

Les 180.000 autres euros ont servi à des dépenses de communication dans le cadre de contrats passés avec la société Giacometti Péron. Cette société est impliquée dans une enquête du pôle financier sur les dépenses de sondages et de communication sous le gouvernement Fillon.

Acte 2 : Rachida Dati réplique avec virulence

Très remontée, Rachida Dati, qui parle "d'attaques mensongères" sur son compte Twitter, dénonce une "cabale politique" jeudi 14 mai sur BFMTV. "Je ne laisserai pas faire", prévient-elle au micro d'iTélé, avant de lâcher :

S'ils veulent me qualifier, comme certains dans l'entourage de Nicolas Sarkozy, de voleuse de poules, d'arabe, de beurette... Certains me traitant de 'zoubida'... Maintenant stop ! Sans vous parler des attaques sexistes. Si on veut me ramener sur le fric, sur le bling-bling, ça va, mais ce n'est pas le cas."

"Pour être défendue contre toute polémique, il vaut mieux s'appeler Christiane Taubira ou Najat Vallaud-Belkacem et être à gauche !" estime-t-elle encore sur Twitter.


"Le ministère de la Justice ne m'a jamais financé de dépenses personnelles ou acheté un quelconque vêtement. Je ne vivais pas au ministère et mes dépenses étaient financées sur mes deniers personnels", affirme-t-elle, interrogée par l'AFP. "La Cour des comptes ne m'a jamais mise en cause ni à titre personnel, ni à titre professionnel", ajoute-t-elle.

Rachida Dati a aussi été défendue par son avocat, qui affirme dans un communiqué diffusé mercredi que l'ancienne garde des Sceaux faisait "l'objet d'une polémique insidieuse [...] Contrairement à ce qui peut être lu dans différents médias, elle n'a laissé aucune ardoise à une quelconque maison de luxe et la Cour des comptes ne lui a pas 'refusé' 9.000 euros de factures".

Acte 3 : le nom de Rachida Dati n’apparaît nulle part

"Le Monde" explique que l’ex-ministre dit plutôt vrai. "A aucun moment les magistrats de la Cour des comptes ne remettent explicitement en cause le bien-fondé des dépenses de son ministère", écrit le quotidien.

En outre, l’arrêt de la Cour des comptes ne cite pas une seule fois le nom de Rachida Dati, bien que la majorité des dépenses soient imputées à son ex-cabinet. La Cour des comptes vise en fait le comptable en chef du ministère. C'est ce fonctionnaire qui est reconnu coupable d'un "manquement" ayant "causé un préjudice financier à l'Etat".

A chaque dépense, le comptable doit remplir un "certificat administratif" rempli en bonne et due forme et signé. Dans plusieurs cas, il a oublié de le faire ou a remis des documents non conformes. La Cour des comptes ne peut donc pas vérifier que les dépenses étaient bien justifiées.

Ayant manqué à sa responsabilité, le comptable en chef est désormais tenu de rembourser à l’Etat les 188.414,83 euros non justifiés. Cependant, lui ou le ministère pourront se pourvoir en cassation auprès du Conseil d’Etat. "Le Monde" souligne également que même si toutefois Rachida Dati était à l’origine de la majorité de ces dépenses irrégulières, "elle ne sera pas inquiétée".

A.S.


N.D.L.R
!

Le Point aurait dû se renseigner !

J'ai été comptable public dans l’Éducation Nationale pendant de nombreuses années et je puis vous dire que le Point a tout faux d'une part, et que d'autre part Mme Dati et ses conseillers, sont de fieffés manipulateurs. Et je reste poli.

Leur argument de défense : la cour des Comptes ne cite jamais Mme Dati.

Et pour cause : la Cour des Comptes n'est pas habilitée à juger les ordonnateurs de dépenses, en l'occurrence l'ex-Ministre de la justice ; elle ne juge que les comptables publics !

La comptabilité publique française repose sur le principe de la séparation de l'ordonnateur (celui qui décide des dépenses publiques) et du comptable public (celui qui les exécute financièrement). Pour simplifier, celui qui décide ne peut pas être celui qui paie. Et vice versa.

La réalité est donc la suivante : la Cour des Comptes épluche régulièrement les comptes des comptables publics. Elle a trouvé dans les comptes financiers du Ministère de la Justice des dépenses quelle qualifie, à raison, d'indues. Effectivement, ce ministère n'a pas vocation à acquérir des foulards Hermes et autres fariboles. Dans cas la Courre rejette les dépenses et par un arrêt de débet, condamne le comptable à rembourser les dépenses rejettées. Sur ces propres deniers !

C'est là une spécificité bien française : les comptables publics, que l'on trouve dans toutes les administrations et dans tous les établissements publics dont les agences comptables de l’Éducation Nationale, qui regroupent plusieurs collèges et lycées et sont dirigées par un fonctionnaire de l'administration ayant qualité de comptable public, sont à ma connaissance les seuls fonctionnaires responsables de leurs actes administratifs, sur leurs deniers, dans ce pays.

Le fait que le comptable du ministère de la justice soit condamné à payer les dépenses de Madame Dati (je ne vois pas qui d'autre, dans ce ministère, aurait pu ordonner le paiement de foulards Hermes et tout le monde connaît les goûts vestimentaires de Mme Dati) ne préjuge pas de la responsabilité du dit comptable. C'est automatique, en comptabilité publique : dépenses indues= arrêt de débet.

Il y toujours par la suite une enquête de l'administration (pas de la Cour des Comptes) chargée de déterminer les responsabilités exactes du comptable public ayant fait l'objet d 'un débet. Si par exemple, il y a eu malversation(s) et pas simplement erreur comptable, le comptable est passible de sanctions administratives qui peuvent aller jusqu'à la révocation sans pension, voire la mise en accusation devant la justice pénale.

La Cour des Comptes, qui ne se prononce pas sur la responsabilité des comptables publics, peut encore moins présumer de celle de l'ordonnateur des dépenses, ici Mme Dati. De fait, les ordonnateurs peuvent être traduits devant la Cour de Discipline Budgétaire, mais autant vous dire que c'est rarissime. Les politiques "responsables" sont rarement reconnus "coupables" N'est ce pas M. Fabius, ou Mme Aubry ? Je ne cite que les plus connus.

En conséquence, exciper de l'innocence de Mme Dati, parce qu'elle n'est pas citée par la Cour des Comptes, est une grossière supercherie qui ne trompe que les journalistes et leurs lecteurs, en s'appuyant sur la méconnaissance de leur part des règles de la comptabilité publique.

Par ailleurs, du point de vue moral, cette attitude de la part de Mme Dati est indigne car elle rejette ses fautes sur le comptable public, qui lui que je sache, a certes failli dans son contrôle des dépenses, mais n'a pas porté les foulards et autres falbalas de la reine des élégances, de l'époque.

Il faut souligner, à cet égard, que la comptabilité publique est quelque part perverse car si le comptable public est indépendant en matière financière de son ordonnateur ; il a le droit et même le devoir dans un tel cas de refuser de payer ces dépenses, il lui est quand même soumis hiérarchiquement ! En effet, le comptable public est un fonctionnaire soumis à l'autorité hiérarchique, dont le patron ultime, dans toutes les administrations est le ministre.

Quand on connaît le caractère de Dame Dati, il est sûr qu'il n'a pas dû être facile au malheureux comptable de s'opposer aux frasques de sa patronne. Dans ce cas, l'alternative est claire : on se couche, ou on dégage. On peut aussi refuser de payer par écrit, avec transmission à qui de droit. Dans ce cas le comptable est dégagé de sa responsabilité. Mais généralement il peut chercher un autre poste. Et comme, de plus, la hiérarchie administrative est très « solidaire » cela se traduit généralement par une mise au placard, assortie de vexations multiples et variées.

Mme Dati, et ses conseillers, jouent sur le velours : ils savent, eux, que la Cour des Comptes et les tribunaux administratifs, voire le Conseil d'État, dans notre pays, ne jugent jamais les politiques mais uniquement les actes administratifs.

Et oui, dans notre pays les politiques jouissent d'une confortable immunité. Les actes qu'ils accomplissent dans leurs fonctions peuvent être mis en accusation, mais pas eux. Bien entendu, s'ils relèvent de la justice pénale ils peuvent être mis en accusation. Mais dans le cas qui nous occupe, si le fait d'acheter des foulards Hermes, entre autres, avec les deniers publics, relève effectivement du droit pénal, Mme Dati ne pourra jamais être inquiétée car ce n'est pas elle qui réglé ces dépenses ! Pire, ou mieux, cela dépend du point de vue où on se place, ces dépenses ont été effectuées par un comptable public !

Ces gens-là ont tout prévu, ils ont la justice pour eux. On ne peut juger Mme Dati que d'un point de vue moral. De ce point de vue, elle a utilisé les deniers publics pour s'acheter des fanfreluches, entre autres, et elle a envoyé à l'abattoir un comptable public qui n'a pas osé s'interposer.

Si elle était honnête, elle rembourserait, éventuellement discrètement, le comptable qui a trinqué pour elle. Mais je ne parierais pas un centime là-dessus. La seule sanction que pourrait encourir Mme Dati serait celle de ses électeurs. Malheureusement, on constate dans notre pays que les politiques qui traînent derrière eux des casseroles bien plus conséquentes, sot régulièrement et brillamment réélus.

Je l'ai toujours dit : on a les politiques qu'on mérite. Tous pourris, il faut voir, mais y compris ceux qui, en connaissance de cause, les élisent et même les réélisent.

N.B

J'ai exercé la noble et parfois ingrate fonction de comptable public, dans l'Éducation Nationale et Outre Mer, ce qui n'est pas l'endroit le plus facile pour faire respecter les règles de la comptabilité publique, pendant 23 (longues années).

Vendredi 15 Mai 2015

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